Forum urbain du quartier Villejean, le 5 juin 2025
Fenêtres ouvertes
L'Allier et le Commentry racontés par ses habitant•e•s
Documentaire photographique au long cours sur la réhabilitation et la restructuration du quartier Villejean à Rennes, mené avec l'agence d'architecture Stavy et en collaboration avec Espacil Habitat.
M. Orriere Serge, appartement n°0901
« Je suis arrivé à Rennes en 1968, avec mon père.
Depuis, je n’ai jamais quitté la ville. Ici, je me plaisais
bien, sinon je ne serais pas resté. Je vais bientôt
déménager dans un T3 en duplex, tout neuf dans un
nouveau lotissement, plus près de mes enfants
qui vivent à Mordelles et Bréal.
C’était ça le but : me rapprocher d’eux.
Le métro, ça a vraiment changé l’image du quartier.
On est bien lotis, j’irais pas critiquer ça ! »
Mme Gougeon Simone, appartement n° 0505
« Je suis arrivée ici en 1967, on était les premiers
habitants de la tour au 14 rue du Nivernais. Avant,
on vivait dans un logement sans douche, avec des
toilettes partagées. En arrivant ici, c’était le confort :
plus grand, bien équipé, avec un ascenseur qui
fonctionnait !
J’ai toujours été très investie : comité des fêtes,
brocantes, majorettes — mes filles y ont même
participé — et puis les animations sur la dalle, les
forums, j’adorais ces moments. J’étais aussi active
au centre social, maintenant je préfère la maison de
quartier, j’y suis bien.
Je voulais rester là, à Villejean. À notre âge, c’est
important : ici j’ai mes médecins, mes magasins, le
métro. J’ai mes habitudes, je ne voulais pas partir. »
M. Proust Claude, Mme Proust Roseline et leur fille, appartement n°0302
« J’habite rue du Bourbonnais depuis 1967. J’ai vu tout le quartier se construire, je connais les bâtiments par cœur,
jusqu’à ce qu’il y a dans les murs ! J’étais chef mécanicien sur les chantiers.
Quand on est arrivés, nos enfants avaient de l’espace, on s’est sentis bien tout de suite. Petit à petit, on a créé
des liens, même des amitiés fortes. Le quartier, à l’époque, c’était une vraie petite commune. On organisait des foires,
des brocantes, des courses cyclistes… Moi j’avais même monté un club de pétanque. Il en reste encore un peu,
mais ça a bien changé.
Le quartier a beaucoup perdu de son âme. Le bar du Kennedy, par exemple, c’était un vrai lieu de vie, plein de jeunes,
d’ambiance. Tout ça, c’est parti. Mais moi, si on relance un concours de boules, j’y vais, hein ! Même avec un seul œil,
j’ai encore mes boules. »
Mme Ngongoto Johana, appartement n°0403
« Je suis arrivée en France en 2009, j’avais 57 ans. En raison de
ma maladie, j’étais obligée de rester en France pour me soigner.
J’aime bien le quartier, c’est vivant, quand je sors sur la dalle, c’est
comme si j’étais en Afrique, c’est ça qui me fait plaisir !
Comme il y a beaucoup de nationalités dans ce quartier,
on s’aborde facilement.
Ce que je cherche, c’est un logement qui puisse être accessible,
qui soit proche des transports, parce que je dois souvent
me rendre à l’hôpital. Ici, j’ai le métro juste à côté,
et en deux stations je suis au CHU. C’est ça qui compte
pour moi : la tranquillité et l’accès aux soins. »
Mme Allard Geneviève, appartement n° 1102
« J’ai vécu 52 ans dans le même appartement, au 8 de la rue
du Bourbonnais. Quand on est arrivés, on a tout de suite aimé
le quartier : c’était comme un grand village. Il y avait tous les
commerces, pas besoin d’aller en ville. On venait de Toulouse,
et ici, tout était à portée de main.
Au début, j’ai dû faire des efforts pour m’intégrer, les Bretons
n’étaient pas très accueillants… Alors j’ai fait de la gymnastique,
de la couture, pour rencontrer du monde. Et puis une fois qu’on
est intégré ici, c’est à la vie à la mort : les gens sont extras.
J’ai connu beaucoup de monde grâce aux associations. Même
quand j’étais dans la tour où il y avait du trafic de drogue, je n’ai
jamais eu de problème, les jeunes me respectaient. Quand
il a fallu partir, ils voulaient faire une pétition pour que je reste,
j’ai trouvé ça trop rigolo.
Aujourd’hui, le quartier a beaucoup changé, il s’est appauvri.
Je comprends que des familles partent. Mais nous, les anciens,
on est restés parce qu’on y tenait ; mes enfants y ont grandi,
j’y ai passé toute ma vie. »
Romane, en service civique à l’AFEV,
appartement n° 1205
« Avec l’équipe, on organise plein d’actions
dans le quartier : friperies solidaires,
réparations de vélo, stands de gâteaux…
Ce sont des moments super sympas, qui
ramènent de la vie sur la dalle. Les gens
sont souriants, ça met de bonne humeur.
Une action qui m’a marqué, c’était les
« Luminions ». On s’est inspirés de la Fête
des Lumières de Lyon, et il y a eu beaucoup
de monde, beaucoup de participants, tout
le monde était hyper joyeux. Il y avait un
petit concert, et plein de gens ont participé,
chanté, dansé… c’était très festif. »
Mme Annick Etienne, appartement n°0602
« J’habite ici depuis 1979. Franchement, les bâtiments, ils ont pas si mal vieilli.
Je suis allée chez mon neveu à Saint-Gilles, le sien a sept ans et c’est déjà la
cata : malfaçon dès le départ. Ici, on voit que c’est entretenu. Nous, on a toujours
pris soin de notre logement.
Ce que j’aime aussi, c’est qu’on se connaît avec les voisins, depuis longtemps.
Avant, ici c’était surtout des logements pour les administrations, des
fonctionnaires, et en face c’était l’armée. C’était à la mode, à l’époque, de vivre
dans ces tours. C’était moderne !
Moi c’est pour ça que je veux rester sur Villejean, parce qu’il y a tout à proximité !
Le métro a vraiment connecté le quartier au reste de la ville. »